La Formule 1 aura peut-être tendance à s’américaniser dans les années à venir, sous l’influence de son nouveau propriétaire Liberty Media, tandis que certains pilotes européens ont fait le choix d’une carrière américaine à l’instar du champion IndyCar 2016 Simon Pagenaud. F1i est parti à la rencontre du pilote français dans son fief de Charlotte, en Caroline du Nord.

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Pourquoi être parti aux States, Simon ?

C’était un choix de carrière, un croisement à un moment donné où il a fallu prendre une décision. J’espérais atteindre la F1, mais une ouverture s’est présentée aux USA dans le championnat de Formule Atlantic en 2006. Il y avait une belle carotte de deux millions de dollars à la clé pour le vainqueur afin de courir ensuite en Champ Car. C’était ma dernière chance de percer et de devenir pilote professionnel, donc j’ai pu décider quelques partenaires de me suivre dans cette aventure en étant conscient que ça passerait ou cela casserait.

J’espérais atteindre la F1, mais une ouverture s’est présentée aux USA dans le championnat de Formule Atlantic en 2006. Il y avait une belle carotte de deux millions de dollars à la clé pour le vainqueur afin de courir ensuite en Champ Car.

Et c’est passé, avec le succès et les conséquences que l’on sait…

En effet, j’ai pu m’imposer en Atlantic et décrocher un volant en Champ Car dans l’écurie de Derrick Walker. Le Champ Car était quelque peu moribond et j’ai eu la chance de pouvoir rebondir en endurance, car j’avais déjà une expérience en Europe chez Pescarolo. En compagnie de Gil de Ferran, nous avons couru en ALMS pour Honda et cela m’a ouvert ensuite les portes de l’IndyCar.

De Ferran a joué un grand rôle dans ta formation américaine, n’est-ce pas ?

Tout à fait, il a été mon Yoda dans Star Wars ! Gil était un pilote très technique et il a travaillé avec moi à livre ouvert en me formatant véritablement dans l’équipe. Nous avons gagné pas mal de courses avec Honda HPD, ce qui m’a permis parallèlement de rejoindre Peugeot en WEC et au Mans. Sébastien Bourdais m’a aussi beaucoup aidé à l’époque pour trouver mes marques aux Etats-Unis, pour gérer la logistique. Deux rencontres importantes.

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Simon avec son mentor Gil de Ferran, qui fut son équipier chez Honda en ALMS.

Honda t’a placé en IndyCar chez Sam Schmidt ou tu t’es fait remarquer, au point d’intégrer la puissante écurie Penske en 2015 où tu as vécu une première année difficile, pourquoi ?

J’avais gagné avec Schmidt et tout le monde s’attendait à ce que je m’impose d’emblée avec Penske, mais les choses ne sont pas aussi simples que ça. C’était la première saison où Penske alignait une quatrième voiture et il a fallu créer l’équipe de toute pièce. Roger Penske et “The Captain”, mais moi je suis le capitaine de la # 22, un team dans le team en quelque sorte. Nous sommes partis de zéro en recrutant ingénieurs, mécaniciens, stratèges et il a fallu un peu de temps pour apprendre à se connaître.

Passage réussi en IndyCar avec Honda chez Schmidt Peterson Motorsport.

Passage réussi en IndyCar avec Honda chez Schmidt Peterson Motorsport.

La saison 2016 a été beaucoup plus constante, avec le titre qui ne semblait pas devoir t’échapper : comment l’as-tu vécue ?

Durant l’hiver, nous avons identifié nos faiblesses de 2015 et on a travaillé dessus. Je pense être un bon metteur au point et l’expérience m’a donné une bonne vision des besoins. J’ai pu fédérer le groupe autour de moi, avec des gens qui croient en moi, et cela a donné de la confiance. Ma force de caractère, c’est de ne jamais rien lâcher, et on a abordé ce championnat avec une mentalité de gagnant.

Je pense être un bon metteur au point et l’expérience m’a donné une bonne vision des besoins. J’ai pu fédérer le groupe autour de moi, avec des gens qui croient en moi, et cela a donné de la confiance.

Tu as gagné sur tous les terrains, mais il manque encore la cerise sur le gâteau : Indy 500 !

C’est une course très particulière et j’adorerais m’y imposer. Ce sera l’objectif en 2017, avec le championnat. Le Team Penske possède un impressionnant palmarès sur le speedway et nous y avons une obligation de résultat, mais ce n’est pas pour me déplaire… Je rêve de boire du lait sur le podium d’Indy !

Pagenaud a gagné à Indianapolis sur le circuit routier, mais pas encore sur le Speedway...

Pagenaud a gagné à Indianapolis sur le circuit routier, mais pas encore sur le Speedway…

Que penses-tu de l’évolution récente de la Formule, la suis-tu régulièrement ?

J’avais un peu perdu l’intérêt pour être honnête, pas vraiment convaincu par les moteurs hybrides et l’absence de bruit : les voitures ne faisaient plus rêver. Je suis curieux de voir les nouvelles monoplaces pour 2017, même si le bruit manquera toujours. Le duel Rosberg-Hamilton était assez passionnant à suivre en raison de sa dimension psychologique. Maintenant, j’ai été surpris d’apprendre la retraite de Nico Rosberg. Moi aussi j’ai 31 ans et je viens d’enlever mon premier championnat, mais la retraite, ce n’est pas pour moi, sorry Nico ! Il a voulu se retirer au sommet, c’est son choix et je le respecte, mais je ne le partagerais pour rien au monde.

La retraite à 31 ans pour Nico Rosberg : pas du tout l'intention de Simon !

La retraite à 31 ans pour Nico Rosberg : pas du tout l’intention de Simon !

Je retournerais volontiers au Mans, évidemment, mais uniquement dans un team d’usine avec des chances de l’emporter. Ce n’est pas une priorité actuellement, je suis vraiment concentré à 100 % sur l’IndyCar et les 500 Miles.

As-tu des regrets par rapport à la F1 ou bien te verrais-tu tenter la NASCAR dans l’avenir ?

Non, je ne regrette vraiment pas mon choix d’avoir orienté ma carrière en Amérique. J’ai toujours eu l’esprit assez ouvert, sans être cloisonné sur la F1, et j’ai aimé courir en endurance car cela m’a beaucoup apporté. Je retournerais volontiers au Mans, évidemment, mais uniquement dans un team d’usine avec des chances de l’emporter. Ce n’est pas une priorité actuellement, je suis vraiment concentré à 100 % sur l’IndyCar et les 500 Miles. Plus tard, la NASCAR pourrait m’attirer. Contrairement à ce qu’on en pense en Europe, c’est une discipline de haut niveau : la course en ovale exige beaucoup de finesse pilotage et de capacité d’anticipation, ce qui me plait beaucoup.

Ziv Knoll s'est rendu aux Etats-Unis pour s'entretenir avec le champion IndyCar en titre.

Ziv Knoll s’est rendu aux Etats-Unis pour s’entretenir avec le champion IndyCar en titre.